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Phytosanitaires : quelle exposition des riverains de zones traitées ?

Publié le : 16 June 2022

Phytosanitaires : quelle exposition des riverains de zones traitées ?

 

Les produits phytosanitaires, plus communément appelés « pesticides », regroupent l’ensemble des produits, naturels ou de synthèse, susceptibles de contrôler, d’attirer, de repousser ou de détruire des organismes vivants considérés comme nuisibles, durant la production, le stockage ou la commercialisation de produits agricoles, de denrées alimentaires, ou de bois. La France est l’un des plus grands utilisateurs mondiaux de produits phytosanitaires, le premier en Europe. Pour les nombreux riverains vivant à proximité de cultures agricoles sur lesquelles des produits phytosanitaires peuvent être appliqués, y compris les agriculteurs et leurs familles, certaines études épidémiologiques ont mis en exergue des effets sur la santé. Pour enrichir les connaissances dans ce domaine, une nouvelle étude, démarrée en 2021 et nommée « PestiRiv », a pour objectif de savoir s'il existe une différence entre l'exposition aux pesticides des personnes vivant près de vignes et de celles vivant loin de toute culture.

 

Une vaste famille de produits

Les produits phytosanitaires, plus communément appelés « pesticides », regroupent l’ensemble des produits, naturels ou de synthèse, susceptibles de contrôler, d’attirer, de repousser ou de détruire des organismes vivants considérés comme nuisibles, durant la production, le stockage ou la commercialisation de produits agricoles, de denrées alimentaires, ou de bois.

Sous le terme de pesticides, plusieurs familles sont différenciées selon leurs actions. Les trois types de produits phytosanitaires les plus utilisés sont :

  • les herbicides, destinés à la destruction des mauvaises herbes;

  • les insecticides, qui s’attaquent aux insectes;

  • les fongicides, utilisés pour éradiquer champignons, mais aussi bactéries et virus.

Il existe près de 100 familles chimiques de pesticides : organophosphorés, organochlorés (DDT,  lindane…), carbamates, pyréthrinoïdes, triazines (atrazine, simazine...), acétamides, etc...

 

Des utilisations jusque dans les jardins particuliers

L’usage agricole des pesticides (grandes cultures, viticulture, arboriculture) est le plus connu. Les produits phytosanitaires sont pourtant utilisés dans bien d’autres domaines: voies ferrées, aires de loisirs (golfs, hippodromes…) ou encore jardins particuliers. Auparavant utilisés aussi dans l’entretien espaces verts, routes et trottoirs, leur utilisation fait désormais l’objet d’une interdiction (en vigueur depuis le 1er janvier 2017).

De nombreux produits de traitement utilisés par les jardiniers et les agriculteurs sont rapportés à l’intérieur des habitations par leurs occupants et leurs animaux domestiques, ou lors de la simple aération des locaux. Ces résidus sont remis en suspension et peuvent perdurer sur les sols, notamment les moquettes et les tapis.

 

La Loi Labbé réglemente la vente et l'utilisation des pesticides

Depuis le 1er janvier 2017, l’utilisation des pesticides chimiques de synthèse dans les espaces publics (parcs et jardins, forêts, voiries, certains cimetières…) est interdite et la vente de ces produits ne peut plus se faire en libre-service.

Depuis le 1er janvier 2019, l’utilisation des produits phytosanitaires par les particuliers est interdite, seuls les produits d’origine naturelle étant disponibles à la vente.

 

Des effets sur la santé…

La famille des pesticides regroupe un nombre très important de substances dont la toxicité et les effets sur la santé sont variables :

  • Certains sont peu toxiques mais extrêmement persistants. Ces produits deviennent alors dangereux du fait de leur accumulation dans les organismes et dans l’environnement.

  • D’autres sont très toxiques à court terme et peuvent provoquer des intoxications aigües, notamment chez les utilisateurs.

Les pesticides peuvent provoquer des atteintes dermatologiques, neurologiques, hépatiques, cardiovasculaires, respiratoires et neurodégénératives. Ils peuvent aussi être responsables de troubles du système immunitaire ou reproductif. Enfin, ils peuvent être cancérigènes et tératogènes, c’est-à-dire responsables de malformations sur les fœtus.

Par ailleurs, à la toxicité de ces matières actives peut s’ajouter celle des solvants et autres additifs, qui se traduisent le plus souvent par une irritation plus ou moins intense des voies de contacts (peau, yeux, voies respiratoires, tube digestif).

 

… et sur l’environnement

L’utilisation accumulée de pesticides engendre une dégradation lente et progressive de la biodiversité des sols agricoles. De nombreux animaux s’intoxiquent avec les pesticides: moineaux, abeilles, poissons… Par ailleurs, certains composés tels les insecticides nuisent à l’activité d’organismes essentiels pour la fertilité des sols, comme les bactéries, champignons, algues, vers de terre, insectes... Pour autant, certaines espèces deviennent de plus en plus résistantes, encourageant l’application de produits plus concentrés, plus toxiques et/ou en plus grande quantité.

La rémanence de ces composés dans l’environnement peut varier de quelques heures ou jours à plusieurs années. Certains sont même classifiés en tant que Polluants Organiques Persistants (POP) : ils persistent pendant des années dans l’environnement et se retrouvent dans la chaine alimentaire de par leurs facilités d’accumulation dans les graisses (caractère « lipophile »).

 

Une étude sur les riverains de zones viticoles

Santé Publique France et l’Anses ont lancé une nouvelle étude visant à mieux connaître l’exposition aux pesticides des personnes vivant près de vignes et de celles vivant loin de toute culture. Cette étude, nommée « PestiRiv », permettra de savoir si les riverains de vignes sont plus exposés aux pesticides et, dans ce cas, formuler des recommandations pour limiter cette exposition.

Les organisateurs de l’étude ont ciblé les vignes car d’une part elles font partie des cultures agricoles qui présentent les pressions phytosanitaires les plus importantes (avec l’arboriculture et la culture de pommes de terre) et d’autre part elles sont particulièrement intriquées avec les zones d’habitations (environ 4% de la population en France métropolitaine vit à moins de 200 mètres d’une parcelle de vigne selon Santé Publique France).

PestiRiv est organisée sur 2 périodes, afin d’évaluer l’exposition saisonnière des populations :

  • Automne/hiver 2021-2022 (octobre à février) dans les communes viticoles, afin d’observer l’exposition aux pesticides de 770 foyers riverains des zones viticoles en dehors des périodes de traitements phytopharmaceutiques dans les vignes

  • Printemps/été 2022 (mars à août) dans les communes viticoles et non-viticoles, lors des périodes d’épandages. Les 770 foyers ayant participé à la première période seront de nouveau sollicités, auxquels s’ajouteront 770 nouveaux foyers résidant à plus de 5 km des zones viticoles.

Les communes dans lesquelles résident des foyers tirés au sort, sont situées dans 6 régions de France métropolitaine : Auvergne-Rhône-Alpes, Grand-Est, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Provence-Alpes-Côte-D’azur et Bourgogne-Franche-Comté.

Le dispositif de mesures prévoit le recueil d'échantillons biologiques (urines et cheveux des participants) et environnementaux (poussières, air à l'intérieur et à l’extérieur des logements, fruits et légumes du jardin). Ces analyses sont complétées par des données de contexte telles que les conditions météorologiques et topographiques, le contexte agricole ou encore les données de surveillance nationale de l'eau.

Plusieurs mois seront nécessaires pour traiter l'ensemble des données. Le rapport complet des résultats de l'étude PestiRiv devrait être publié en 2024.

  

 

 Les bons gestes

En attendant les recommandations de l’étude PestiRiv pour limiter son exposition aux pesticides en tant que riverain de zone viticole traitée, les pouvoirs publics adressent des conseils aux riverains de parcelles agricoles.

  • Je respecte un délai d’au moins 3 jours avant la consommation des fruits et légumes qui ont été potentiellement pulvérisés

  • Je lave abondamment et épluche les fruits et légumes provenant des jardins proches du site traité

  • J’évite tout apport de terre à l’intérieur du logement, je nettoie et change mes chaussures en entrant dans le logement

  • J’éloigne les enfants du site traité. Si ce n’est pas possible, je veille à ce qu’ils aient des activités qui limitent les contacts cutanés avec le sol traité et l’ingestion de poussière

  • Je lave mes mains et celles des enfants très régulièrement, en particulier avant la prise d’un repas, je me coupe les ongles courts et les brosse fréquemment, et, de manière générale, j’assure une bonne hygiène, avec une attention particulière pour celle des enfants

  • Je procède, avec des gants, au nettoyage humide des sols et du mobilier extérieur, des rebords de fenêtres et des dallages à proximité des maisons

  • Je lave régulièrement les jeux d’enfants présents à l’extérieur du logement

  • Je donne des bains réguliers aux animaux de compagnie (au moins une fois par semaine) et si possible juste après un épandage si mon animal est susceptible d’avoir été présent dans la zone traitée

  • Je renouvelle l’eau de ma piscine selon les recommandations usuelles

 

En complément des recommandations à suivre toute l’année, lors des épandages de proximité, il est recommandé, par mesure de précaution, de :

  • Je ne laisse pas les enfants dehors pendant la durée de l’épandage et au moins 1h après, surtout en cas de vent important

  • Je ferme les fenêtres pendant la durée de l’épandage puis aère après avoir attendu au moins 1h

  • Je relave les vêtements qui auraient séché dehors pendant de l’épandage

 

Au-delà de ces mesures de précaution, je peux informer l’ARS et le Centre antipoison des symptômes aigus suite à un épandage de pesticides.

 

En savoir plus

 

Sources